S’investir dans la réussite d’une entreprise ou d’un projet associatif, d’un projet de vie, d’un couple, d’une transformation personnelle est l’enjeu de toute personne engagée. Comment favoriser cet engagement ? Comment faire naitre le désir et la volonté de prendre pleinement part à ce défi ? Et qu’est-ce que l’engagement ?
S’engager n’est pas uniquement le respect de certaines règles ou d’un cadre contractuel. De même, s’engager ne consiste pas uniquement en du militantisme et de l’activisme, dont les manifestations peuvent renvoyer parfois à des enjeux de pouvoir et à du rapport de force.
L’engagement est un choix libre et conscient. Il s’agit d’un mouvement, d’un élan intérieur d’un appel pour une cause qui nous anime. Une cause dont les enjeux éveillent notre désir de changement, d’évolution, de contribution à rendre les choses meilleures. On peut être touché par une idée, un projet, mais rester sur la berge et ne jamais plonger. Être embarqué dans l’aventure ne veut pas dire qu’on s’y engage.
L’engagement nous met face à notre responsabilité par rapport aux situations que nous vivons et à nos devoirs vis-à-vis d’autrui. Il nous interpelle sur nos choix, nos actes, nos valeurs et notre cohérence.
Est-ce que nous sommes prêts à plonger dans les profondeurs de nous-mêmes ? Des profondeurs qui se révèlent au fur et à mesure que l’engagement s’affirme et s’assume.
Un engagement comme son étymologie l’indique « mettre en gage », n’est pas gratuit. Il coûte. Il coûte peut-être le prix de notre indifférence, de notre individualisme, de notre égocentrisme.
Il implique que nous ayons conscience du monde avec lequel nous interagissons, de notre impact, de notre inter-dépendance et du miroir que constitue notre réalité.
Il est toujours possible d’accuser l’autre, la situation, l’entreprise, se considérer impuissant face à ce que nous vivons et qui n’est pas en notre pouvoir, cela nous conforte peut-être dans une bonne conscience. Mais soyons vigilants à ce que cette bonne conscience ne soit pas une belle planque pour se réfugier et se légitimer dans la non-action.
Avons-nous le courage de prendre acte de notre responsabilité face à ce que nous vivons ? Avons-nous le courage d’accepter de voir le miroir de nous-même qui nous est présenté par l’extérieur ? Avons-nous le courage de nous laisser heurter, toucher, percuter et de décider en toute conscience de faire bouger les lignes, d’agir et de nous engager ?
Nous avons toujours le choix, celui de devenir acteur et co-créateur de notre réalité plutôt que de la subir ou d’y résister en luttant par tous les rapports de force des plus grossiers aux plus subtils. C’est notre libre-arbitre, faire le choix de la responsabilité, dont le sens premier est l’habilité à répondre et donc la capacité à agir.
Chacun d’entre nous a été bousculé ces deux dernières années. Cette crise est venue nous confronter au sens que l’on souhaite donner à notre vie, à la notion de liberté, aux choix que nous devons opérer pour être plus cohérents avec nos valeurs et nos aspirations. Cette crise est une opportunité pour nous redéfinir, c’est une opportunité pour nous engager à être le changement que nous voulons voir dans le monde, dixit Ghandi.
C’est une invitation personnelle, pour chacun de nous, à nous engager dans notre propre transformation intérieure, sans laquelle, en vertu de la loi du dedans/dehors, il ne peut y avoir de transformation extérieure.
Je considère personnellement que l’enjeu de cette crise civilisationnelle, qui nous a arrêté en pleine course effrénée, est de nous permettre de prendre conscience de notre interdépendance et d’œuvrer pour un vivre ensemble harmonieux et durable.
Sommes-nous chacun de nous engagés pour la naissance de ce nouveau monde, pour la naissance d’une nouvelle ère plus fraternelle et solidaire ?
En évoquant la naissance, je ne peux m’empêcher de faire le lien avec notre propre naissance. Rappelons nous que notre premier engagement (c’est le terme clinique d’usage) est celui où nous nous sommes engagés dans le col de l’utérus.
Nous avons peut-être gardé engrammée dans nos cellules, cette peur première de l’engagement. Toutefois rappelons nous également que cet engagement n’est pas subi, nous en avons été pleinement acteurs, c’est l’ocytocine que sécrète le bébé qui déclenche le processus d’accouchement. Nous avons déjà affronté la peur d’avancer dans l’obscurité, vécu la restriction de nos mouvements, pris part à un processus où aucun retour en arrière n’est possible. Nous avons su quitter la sécurité d’un monde connu pour basculer dans un autre monde, sortir à la lumière et recevoir le précieux cadeau de la vie.
Dans chacun de nos engagements, résonne cette peur. La peur de l’inconnu, de ce que notre engagement provoquera comme changements dans nos vies et en nous-mêmes.
Le courage c’est d’avancer, de plonger, d’y aller, malgré la peur.
La volonté et le désir de nous engager, cette mobilisation de soi, comme la nomme la philosophe Marie Robert, est une véritable puissance qui grandit petit à petit et qui vient rompre l’ordre établi, bousculer nos certitudes autant que nos habitudes. L’engagement nous offre le cadeau de devenir meilleur, pour soi, pour les autres et pour les causes qui nous animent.
Être meilleurs en œuvrant à faire les 4 B comme les appelle Arouna Lipschitz, philosophe de la relation, le Bon, le Bien, le Beau de Platon auxquels elle rajoute le Bio, dans le sens du vivifiant pour l’autre. L’engagement nous permet de servir et d’acter des valeurs qui nous rendent fiers et dignes.
Un engagement lorsqu’il est libre et conscient devient léger. Il nous met dans la joie, le plaisir et la créativité pour être meilleur. Meilleur pour soi, pour les autres, pour les organisations pour lesquelles nous œuvrons, et par conséquent pour le monde. Et quoi de plus inspirant, motivant et favorisant l’engagement que de voir ces valeurs actées et incarnées.